Très peu de temps après le début de la crise sanitaire (mars 2020), le gouvernement fédéral de l’époque a mis en place le droit passerelle dit Corona. Ce droit passerelle « nouvelle mouture » est pour l’essentiel l’activation d’un dispositif social pré-existant (au demeurant très peu utilisé), mais en facilitant grandement son accès, tant en ce qui concerne les conditions légales d’obtention que les démarches administratives. Ce dispositif social amélioré a été depuis lors prolongé, amélioré (droit passerelle doublé en novembre et décembre 2020) et étendu (par exemple le droit passerelle partiel ou le droit passerelle de soutien à la reprise).
Parmi les professions les plus touchées par la crise et les fermetures imposées, il y a bien sûr les restaurateurs, les traiteurs et les cafetiers (statistiquement = Code NACE 56).
Cette Brève de l’Institut pour un Développement Durable a pour objet de comparer les revenus des indépendants actifs sous le code NACE 56 avec la hauteur du droit passerelle.
La principale conclusion : On peut estimer qu’au moins 45% des indépendants actifs sous le code NACE 56 ont avec le droit passerelle un revenu (avant IPP) supérieur au revenu imposable (déduction faite des cotisations sociales donc) découlant de leur activité. Ce pourcentage monte à au moins 79% pendant les 3 mois où le droit passerelle a été doublé.
Quelle lecture politique faire de ce constat ?
Il apparaît essentiel de distinguer plus clairement les aides qui visent à garantir un certain niveau revenu des mesures dont l’objectif est de garantir le maintien de l’activité.
Notons ici que – implicitement en tout cas – l’aspect protection de l’activité semble l’avoir emporté sur la dimension garantie d’un revenu minimal dans la vision du droit passerelle de crise, ce qui expliquerait l’idée d’octroyer un double droit passerelle pour le dernier trimestre 2020 et la facilité pour y accéder.
Au total on ne dispose pas des données nécessaires pour déterminer qui va perdre (voire gagner dans certains cas ?) ni combien, d’autant plus qu’on peut imaginer que des indépendants devront rogner sur leur revenu pour payer la partie des dépenses fixes qui ne serait pas couverte par les aides régionales. Mais des réponses doivent être produites à cet égard, ne serait-ce que pour adapter les mécanismes de crise pour les rendre plus équitables en matière de revenus et plus efficaces en matière de maintien de l’activité.Â
Il est temps de corriger structurellement les dispositifs imaginés/activés/modifiés dans l’urgence. Les indépendants ont comme tout travailleur le droit d’être protégés contre les pertes de revenus mais il n’y a aucune raison de ne pas s’inspirer des principes applicables en matière de chômage des salariés (proportionnalité, financement contributif et solidaire, prise en compte des périodes concernées dans le calcul de la pension). Les aides visant le maintien de l’activité doivent elles être proportionnées sur base de critères objectifs. Les deux types d’aides doivent être clairement dissociés, conceptuellement et concrètement, et la cohérence des interventions assurée entre les niveaux de pouvoir.    Â
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